[2000] Libération et Noam Chomsky

Le droit de réponse et les directeurs de conscience

Par Acrimed

Retour Acrimed, Avril 2000 Imprimer

Deux exercices récents du droit de réponse – Noam Chomsky dans Libération, Elisabeth Lévy dans Télérama – soulèvent quelques problèmes dont on confie parfois la solution à la déontologie.

Libération, le vendredi 14 avril, publie dans les pages Rebonds une Tribune libre d’Yves Laplace, sous le titre suivant ” Kosovo : l’imposture Noam Chomsky ” Cette tentative de ” réfutation ” a pour particularité de ne discuter aucun des arguments de Noam Chomsky. “Préfacier” de Noam Chomsky, Jean-Michel Helvig, après avoir mis en garde le lecteur contre l’auteur qu’il publie dans les pages “Rebonds”, répond à des universitaires qui s’étonnent de cet étrange procédé…

Libération, le vendredi 14 avril, publie dans les pages Rebonds une Tribune libre d’Yves Laplace, sous le titre suivant ” Kosovo : l’imposture Noam Chomsky ” et pour surtitre ” Pour l’auteur du ” Nouvel Humanisme militaire ” , les génocidaires seraient les ” impérialistes ” américains et non les séides du régime Milosevic “.

Cette tentative de “réfutation ” a pour particularité de ne discuter aucun des arguments de Noam Chomsky, mais de multiplier les accusations vengeresses, quand elles ne sont pas franchement injurieuses : le Nouvel Humanisme militaire est ” un salmigondis allumé et sectaire “, ses méthodes ” des méthodes de ficheur, au sens policier du terme “ qui recourt à ” l’amalgame, l’insinuation, l’intimidation et la délation “ et tente “ d’imposer une vision globale, sinon totalitaire, du génocide à travers les âges “. Chomsky obéit à ” des mécanismes de pensée proches de ceux qui opèrent dans divers révisionnismes “ et “ s’abrite derrière sa NON-NEGATION de la Shoah “. Vient enfin la calomnie : ” Comme l’a signalé Alain Finkielkraut dans l’Avenir d’une négation (Seuil, 1982), le futur auteur du Nouvel Humanisme militaire relativisait alors le génocide cambodgien – en le rapportant, déjà, aux massacres du Timor-Oriental “.

A cette charge, Noam Chomsky oppose une réponse qui paraît dansLibération le jeudi 25 mai 2000, soit… un mois plus tard. Cette réplique – ” Ces génocides que l’on occulte ” – est partielle, mais elle vaut comme un démontage des procédés d’Yves Laplace : elle porte sur les accusations falsifiées sur la question du Cambodge.

Il n’en fallait pas plus pour que l’occasion soit donnée à Libération de relancer un non débat et, d’inventer une nouvelle pratique d’encadrement du droit de réponse. Encadrement est à prendre ici au sens fort. En effet, non seulement la réponse de Chomsky est suivie d’une réplique qui, rédigée par Yves Laplace, laisse à celui-ci le dernier mot, mais surtout, fait exceptionnel, la réponse de Noam Chomsky est précédée d’ un “chapeau ” – Une mise au point ? Une tribune libre ? Un mode d’emploi ? Une mise en garde ? Une mise à l’index ? – de Jean-Michel Helvig qui mérite d’être citée et commentée [entre parenthèses], tant elle est révélatrice de la morgue dominatrice d’un certain journalisme dominant.

Une préface de Jean-Michel Helvig

”  Libération a publié le 14 avril, un texte de l’écrivain Yves Laplace critiquant le dernier livre de Noam Chomsky, récemment publié en Suisse : “le Nouvel Humanisme militaire, leçons du Kosovo”. Yves Laplace se livrait à une analyse [vraiment ? ? ?] des errements du linguiste américain s’agissant de la guerre des Balkans, les replaçant dans la logique ancienne d’un Chomsky obsédé de la dénonciation de l’impérialisme occidental en général et américain en particulier [ invention d’un esprit délirant, l’impérialisme occidental serait donc un pur fantasme…].

On avait pu déjà avoir un aperçu de cette démarche lors du génocide cambodgien, quand il s’était employé à relativiser les crimes des Khmers rouges en opérant un détour sur les massacres des Timorais par les Indonésiens alliés de Washington. Comme il relativise aujourd’hui ceux de Milosevic en insistant sur les exactions des turcs – alliés de Washington aussi ! – contre les Kurdes.

[Bref, Jean-Michel Helvig reprend à son compte les accusations – et non les analyses – de Laplace, que Chomsky s’emploie à réfuter dans sa réponse. Mieux : Helvig ne tient aucune compte de cette réponse.]

La critique de Yves Laplace, écrivain souvent invité dans nos colonnes, ne relevait pas du “flot d’invectives” qu’y a vu Noam Chomsky.

[ ” Souvent invité ” : est-ce parce que Libération dispose d’une pouvoir de consécration particulier, qui l’autoriserait à faire le tri entre les ” bons ” et les ” mauvais ” intervenants ? Il faudrait à ce journal une lucidité exceptionnelle, celle-là même qui lui manque quand il ne parvient pas à découvrir le ” flot d’invectives ” que nous avons rappelé ci-dessus. ]

Ce dernier, qui a adressé à Libération, sa réponse, aurait mieux éclairé sur son livre s’il avait daigné répondre sur le Kosovo plutôt que de régler des comptes vieux de vingt ans sur Timor.

[Autrement dit, il n’aurait pas du répondre à l’accusation qu’Helvig reprend le jour même à son compte, alors que précisément la question du Timor vient d’être rappelée à ceux qui l’avaient oubliée, parfois même depuis son origine. Et Chomsky – pour que le procès puisse se dérouler normalement – aurait dû répondre sur le Kosovo, alors que tout son livre est lui est consacré.]

On lira la réplique de Yves Laplace à Noam Chomsky.

[Une ” réplique ” d’Yves Laplace qui ne mérite aucune admonestation préalable . Une ” réplique ” dont le style énergumène contraste cette fois encore avec le ton très paisible de Chomsky. C’est pourquoi ” on lira “, dans le contexte de ce procès vaut pour ” il faut lire “. Cette ” réplique ” n’attendra donc pas un mois avant d’être publiée : elle le sera le jour même pour clore ce qu’il faut bien appeler un non-débat ou une exécution journalistiquement correcte.]

Noam Chomsky ayant eu le droit de répondre aux accusations, mais encadré, dans le box des accusés, par deux gardiens du bon ordre intellectuel, Jean-Michel Helvig croyait sans doute en avoir fini avec la mission qu’il s’était assignée. C’était sans compter avec une intervention de quelques universitaires : une intervention qu’on lira ci-après, car elle leur valut une bien intéressante réponse.

I. Une lettre d’universitaires

À Monsieur Jean-Michel Helvig, – le 8 juin 2000.

Nous vous prions de bien vouloir publier la lettre qui suit dans votre rubrique ” Rebonds ” ou sous toute autre forme que vous jugerez appropriée. Tous les signataires sont enseignants universitaires. Dans l’attente de votre réponse et en vous en remerciant par avance, je vous prie, Monsieur, d’agréer mes salutations distinguées. Gilbert Achcar

Lorsqu’on procède à la critique d’une œuvre ou d’un écrit, le critiqué est en droit d’attendre qu’on ne le disqualifie pas avant examen, mais au contraire que l’on discute sérieusement ses positions et ses arguments en essayant de les restituer pour en montrer les faiblesses supposées. C’est pourquoi nous devons dire notre stupéfaction devant le traitement réservé à Noam Chomsky dans le numéro du 25 mai 2000 de Libération. Fait inhabituel, le ” Rebonds ” de Chomsky est précédé d’un chapeau de Jean-Michel Helvig qui prend parti de façon péremptoire pour Yves Laplace et l’article qu’il a publié antérieurement dans Libération contre le livre de ChomskyLe Nouvel Humanisme militaire. Leçons du Kosovo. Selon Jean-Michel Helvig, il n’y aurait pas eu d’invective contre Chomsky, alors que ce dernier est accusé d’imposture par Yves Laplace. Lui-même, pour faire bonne mesure, parle de Chomsky comme d’un obsédé de la dénonciation de l’impérialisme, qui aurait relativisé les crimes des Khmers rouges (pure calomnie comme le montre Chomsky lui-même) et, bien sûr, ceux de Milosevic.

Tout lecteur un peu attentif des écrits de Chomsky et plus particulièrement de son dernier livre peut constater qu’il s’agit là de contrevérités. La condamnation qu’il porte sur l’intervention de l’OTAN en Yougoslavie ne repose pas sur une quelconque indulgence pour Milosevic et encore moins sur une sous-estimation du nombre de ses victimes. Elle est fondée, en fait, sur une analyse très serrée de la conférence de Rambouillet et des objectifs qu’y poursuivaient les États-Unis. Dans son livre, Chomsky s’est efforcé de démontrer que toutes les ressources de la diplomatie n’avaient pas été exploitées et cela délibérément pour avoir la possibilité de frapper la Yougoslavie en sauvegardant la crédibilité de l’OTAN. Il a également voulu montrer que ce n’était pas l’humanitaire qui était essentiel dans l’affaire en se référant à l’indifférence, voire à la complicité des occidentaux devant les exactions et les massacres commis par l’État turc contre les Kurdes pendant les années quatre-vingt-dix. C’est tout cela qu’il faut réfuter, si l’on veut discuter sérieusement Noam Chomsky.

Dans sa réplique à la réponse de Chomsky, Yves Laplace se surpasse. Il prétend que Chomsky joue de la Turquie pour faire oublier le Kosovo alors que le livre revient longuement sur ce qui s’est passé au Kosovo depuis 1989 à partir d’une documentation abondante. Il l’accuse ensuite de double langage en matière de génocide et de révisionnisme, ce qui revient à dire que Chomsky serait à classer du côté de Rassinier et de Faurisson. Accusation monstrueuse, insupportable, d’autant plus insupportable qu’elle ne peut citer à son appui aucun texte de Chomsky. Il est vrai qu’Yves Laplace se fonde sur un passage du livre de Chomsky où ce dernier attribue aux États-Unis dans leurs guerres d’Indochine plus de morts qu’aux Khmers rouges. Cela revient-il à nier le génocide cambodgien ? Certainement pas, mais cela invite à s’interroger sur le nombre des victimes au Vietnam et sur la responsabilité des États-Unis dans la victoire des Khmers rouges (qui deviendront les alliés des occidentaux après 1979). Yves Laplace nous dit aussi que Noam Chomsky oublie dans son livre les victimes de Milosevic en Bosnie et en Croatie (alors qu’il limite son propos explicitement au Kosovo). Puis par un glissement sémantique incroyable, cet oubli devient ” une lassante dénégation en creux d’un crime majeur “, qui relève d’une ” logique de fossoyeur amnésique ” selon les termes élégants d’Yves Laplace. Ce n’est plus de l’invective ou de la calomnie, c’est de l’injure la plus basse.

Tout cela traduit une navrante dégradation de l’esprit de discussion. Yves Laplace a pris l’habitude de se draper dans l’indignation et la supériorité morale pour mieux souligner l’indignité de celui qu’il critique. Il y a là une véritable négation de ce que sont le débat, la confrontation et, disons le tout net, le droit à l’expression démocratique. Ce qu’Yves Laplace nous dit, c’est que Noam Chomsky n’est pas un interlocuteur et qu’il n’est nul besoin de le lire ou de l’écouter.

Gilbert Achcar, James Cohen, Bruno Drweski, Hugo Moreno, Isabelle Richet, Nicole-Edith Thévenin, Enzo Traverso, Michel Vakaloulis, Jean-Marie Vincent.
(Les signataires sont tous enseignants universitaires)

II. La réponse de Jean-Michel Helvig ; 8 juin 2000

Nous avons publié une critique d’un livre de M. Chomsky, M. Chomsky a répondu sur une distance au moins égale à la critique (ce qui est exceptionnel dans le genre…), j’ai rappelé qu’au regard du texte initial de Yves Laplace il ne répondait pas au fond du sujet, j’ai exprimé effectivement une inclination positive en faveur d’un des deux interlocuteurs qui ne devrait pas vous surprendre compte tenu des positions éditoriales de Libération, j’ai évité de rappeler les engagements préfaciers de M. Chomsky en faveur de M. Faurisson – la “liberté” de M. Faurisson pas les thèses de M. Faurisson, merci, j’ai compris -car cela aurait valu la résurgence d’un débat qu’a excellemment clos Vidal-Naquet (en 1980), j’ai évité aussi de souligner combien la référence à l’ouvrage de Ponchaud sur le Cambodge est manipulatrice ( pour de simples questions de dates) car là-aussi cela nous aurait valu un nouveau flot de récusations du parti chomskyste, bref j’ai voulu en rester au Kosovo, et, pour finir, nous en resterons là, dans l’immédiat, s’agissant d’une polémique à propos d’un livre dont, sauf erreur de ma part, nous aurons été les seuls à peu près en France à signaler la parution. Comme vous semblez penser que la seule lecture du livre de Chomsky fera litière de toutes les arrogantes critiques que de sombres crétins vendus à l’impérialisme ont prétendu exercer sur les œuvres du grand homme, vous devriez nous remercier d’en avoir seulement parlé. Et vous comprendrez que la parution de votre texte ne me semble pas utile pour éclairer des lecteurs qui ont déjà eu tous les éléments en main pour se faire une opinion. Y compris à notre détriment.

Bien à vous
Jean-Michel HELVIG

III. Réponse à la réponse de Jean-Michel Helvig ; Le 13 juin 2000

Monsieur,
Nous prenons acte, avec regret, de votre refus de publier la contribution collective que nous vous avons adressée. Nous prenons acte aussi et surtout du ton hargneux de votre réponse et de votre aveu d’attitude partisane au nom des ” positions éditoriales deLibération “. Comme vous avez décidé de clore le débat, tout en glissant des semblants d’arguments qui révèlent une méconnaissance du dossier, nous en resterons là nous aussi dans l’immédiat. Toutefois, les épithètes outrageantes que vous utilisez, les insinuations injurieuses et calomniatrices à l’égard des signataires de la contribution, qui contrastent fortement avec le ton très mesuré de notre texte, tout cela est symptomatique d’un esprit d’intolérance fort inquiétant lorsqu’il émane du responsable de l’une des principales tribunes de débat public en France. À ce titre, votre lettre mérite d’être versée au dossier de l’arrogance médiatique que la guerre du Kosovo a révélée dans ce pays. Elle le sera.

Bien à vous,
Gilbert Achcar et Jean-Marie Vincent

IV. Réponse à Noam Chomsky à Jean-Michel Helvig

En exclusivité pour Pas Lu dans Libé :

« Mes rapports avec Libération remontent à plus de vingt ans. À l’époque, je leur avais accordé un entretien. Ils ont exigé que j’en supprime les passages qui ne leur convenaient pas politiquement. J’avais naturellement refusé. Leur refus de publier aujourd’hui la lettre [qui vient de leur être adressée] ne m’étonne donc pas. Il est scandaleux, mais il reflète sans doute assez précisément la moralité intellectuelle de ce journal et la règle qui veut qu’une phrase lui suffit pour diffamer alors qu’il faudrait toujours au moins un paragraphe pour se défendre. Ainsi, Helvig continue à ressasser l’idée selon laquelle je relativiserais les crimes de l’ennemi en les comparant à ceux dont Helvig – et moi même – sommes responsables puisqu’ils ont été commis par nos gouvernements. Apparemment, Helvig a été incapable de comprendre ma réponse à cette accusation. Pourtant, l’analyse que je faisais n’excédait pas, à mon avis, les capacités intellectuelles d’un enfant de dix ans. »

V. Point de vue de Pas Lu Dans Libé

Pourquoi le quotidien de Serge July exècre-t-il les auteurs simultanément dotés d’un cerveau et d’une colonne vertébrale ? Pourquoi Libération déteste-t-il l’intellectuel américain Noam Chomsky en particulier ? PLPL peut désormais le révéler.

L’apnée intellectuelle à laquelle Libération convie ses fidèles est périlleuse : les abîmes atteints dans les années 80 ont découragé les plongeurs les plus endurcis. Les pages « Rebonds » du quotidien sont les plus profondes. Là s’épanouit le tennisman Alain Duhamel, là grouillent les points de vue préalablement désinfectés de toute réflexion, les manifestes les plus sordides et les plus niais, ceux que même Le Monde a dû refuser de publier. Mais dès qu’il s’est agi du livre de Noam Chomsky sur le Kosovo (Le Nouvel Humanisme militaire) l’indolence du clapotis balladurien s’est transforme en coulée de haine — ans doute parce que le linguiste américain n’apprécie guère la presse française qu’il juge d’une veulerie exceptionnelle. Un intellectuel serge-julyste aussi fanatique qu’obscur a donc glapi contre Chomsky : « Salmigondis allumé et sectaire… méthodes de ficheur au sens policier du terme… amalgame… insinuation… intimidation… délation… révisionnisme… imposture, etc. » (Libé, 14/4/2000). Un mois plus tard, Libération récidivait en stigmatisant les « errements du linguiste américain, obsédé de la dénonciation de l’impérialisme occidental » (25/5/2000).

Pour Libération, ce dernier crime est en effet gravissime : Serge July voit dans l’Amérique le grand pays où, la panse pleine, « on peut acheter une chaîne hi-fi à trois heures du matin ». D’une telle analyse découlent presque tous les choix de politique étrangère de son journal depuis vingt ans. Noam Chomsky, justement, a rendu compte des travaux d’un chercheur sur le traitement médiatique de la guerre conduite au Nicaragua dans les années 80 par des milices d’extrême-droite liées à la CIA. Sa conclusion : « Le journal européen le plus honnête était The Guardian, de Londres ; le pire de tous était le quotidien parisien Libération, super-reaganien à l’époque, allant au-delà des pires journaux des États-Unis dans son adhésion à la propagande du gouvernement américain. » (Le Diplo, août 1998)

À l’époque, July avait pâli et juré de se venger comme un plat froid — qui l’aurait rendu encore plus gras. D’où, deux ans plus tard, l’attaque contre Chomsky. Hélas pour July, PLPL l’a appris.

Depuis, Libération cherche à se vendre. Et Serge July a rédigé la petite annonce dans le style qui a soudé une génération d’analphabètes : « Libération est un journal libre, qui le prouve, nous l’espérons, chaque jour, en allant à l’encontre des idées reçues, y compris les nôtres, en étant pleinement Libération. C’est-à-dire le quotidien de toutes les libérations, le quotidien de la société, le journal enfin qui réfléchit à l’actualité d’un monde sans cesse changeant. Nous souhaitons que tous nos lecteurs participent à la réussite de cette entreprise de la liberté. » (Libé, 3/3/2000) Ce texte adipeux a provoqué l’hilarité générale.

VI. Injures ou débat ? Deux critiques du livre de Noam Chomsky

Libération, le vendredi 14 avril, publie dans les pages “Rebonds” une tribune libre d’Yves Laplace, sous le titre suivant ” Kosovo : l’imposture Noam Chomsky ” et pour surtitre ” Pour l’auteur du “Nouvel Humanisme militaire”, les génocidaires seraient les “impérialistes” américains et non les séides du régime Milosevic “.

On peut y lire notamment que Le Nouvel Humanisme militaire est ” un salmigondis allumé et sectaire “, ses méthodes ” des méthodes de ficheur, au sens policier du terme ” qui recourt à ” l’amalgame, l’insinuation, l’intimidation et la délation ” et tente ” d’imposer une vision globale, sinon totalitaire, du génocide à travers les âges “. Selon Laplace, Chomsky obéit à ” des mécanismes de pensée proches de ceux qui opèrent dans divers révisionnismes ” et ” s’abrite derrière sa non-négation de la Shoah “. [souligné par nous]

Alors que Libération publie ce texte injurieux sur le livre de Chomsky, dans Business Week, Patrick Smith, ancienne correspondante du International Herald Tribune en Asie, rend compte ainsi de ce livre : ” Les bombardements de l’OTAN ont peut-être poussé Milosevic à bout, mais Chomsky démontre qu’ils s’opérèrent contrairement à la loi internationale. Que la guerre aurait pu être évitée et qu’elle fut motivée par des raisons stratégiques plus qu’humanitaires. Comme il l’explique, les bombardements eurent pour objet de consolider l’OTAN et de mettre en garde tous ceux qui pourraient rêver de le défier. La critique radicale de Chomsky lui a valu depuis longtemps de résider dans la Sibérie du débat politique américain. C’est un destin immérité. Ce que Chomsky a à nous dire est légitime. Si quelque chose de neuf devrait caractériser notre époque, c’est que les questions posées par Chomsky devront trouver une réponse. Qu’on soit ou non d’accord avec lui, on perd beaucoup à ne pas l’écouter. ”

C’était notre rubrique ” l’exception française “.

© Acrimed


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